Giles Daoust incarne la troisième génération aux commandes de Daoust, l’une des principales sociétés RH de Belgique – qui fête cette année ses 70 ans. Désormais Chairman (il vient de céder la fonction de CEO à Maxime Deremince), il partage avec nous ses réflexions sur la transmission des entreprises familiales.
"Anéantissez votre ego et votre culpabilité, et vous serez de bien meilleurs dirigeants!" Telle était la conclusion d’une récente chronique signée par Giles Daoust dans le magazine Brussels Business – écrire est en effet l’un des multiples exercices qu’il affectionne.
Parmi ses thèmes favoris, il évoque souvent la toxicité de l’ego pour l’entrepreneur. "Cela vaut aussi pour le repreneur familial. Il arrive à la tête d’une entreprise qui a été créée et développée par quelqu’un d’autre – son père, sa mère… Inévitablement, le successeur subit la comparaison. Surtout s’il est jeune, il sera tenté de ‘rouler des mécaniques’, de vouloir en faire encore plus pour prouver qu’il est à sa place."
"L’autre ennemi, c’est la culpabilité: on doit absolument réussir pour ne pas ruiner les efforts des générations précédentes – et on se met une énorme charge mentale."
"L’ego et la culpabilité ne sont pas les bons moteurs; ce sont des facteurs d’échec. Si l’on parvient à s’en détacher, on peut se focaliser sur l’avenir et sur les objectifs: développer l'entreprise, la moderniser, renforcer sa rentabilité, etc. Dès lors, la réussite de la mission s’évalue sur d’autres bases."
Le même conseil s’adresse au cédant de l’entreprise familiale: "Souvent, il ou elle s’identifie très fort à ‘son’ entreprise – encore une histoire d’ego. Cela peut l’amener à résister au changement, à peser sur l’action de son successeur, ce qui est très toxique. La seule mission du cédant, une fois qu’il a décidé de passer la main, devrait être de préparer le terrain pour son successeur, puis de faire place – en admettant que la génération suivante fera ses propres erreurs."
CEO de Daoust depuis 2015, Giles Daoust vient lui-même de céder la direction opérationnelle à Maxime Deremince, premier CEO non-familial. "J’ai toujours eu des activités multiples; je voulais retrouver du temps pour cela. Mais je ne me retire pas: je reste Chairman et je continuerai à piloter une dizaine de task forces, dont la stratégie et l’innovation."
Quant à l’avenir? "J’espère que l’entreprise restera familiale, mais reprendre ne devrait jamais être une obligation. Chacun doit suivre sa voie. Si la génération suivante n’a pas la ‘fibre’ pour gérer l’entreprise, rien ne la force d’ailleurs à vendre: on peut très bien détenir une entreprise sans la diriger."
"J’en reviens à l’ego: il ne faut jamais se considérer comme plus important que les autres, ni considérer que l’entreprise familiale soit plus importante que tout, sinon elle finit par écraser la famille. Beaucoup de familles entrepreneuriales se déchirent pour cette raison et se rendent très malheureuses. Cela ne vaut pas ça."
Dans notre dossier "Transmission d’entreprise":
Edito: Reprendre, c’est entreprendre!
La Maison du Repreneuriat, pour passer le témoin en confiance
Céder son entreprise: "Surtout, ne le faites pas seul!"