On la dit connectée, ouverte, créative, engagée, à la fois collaborative et individualiste, pragmatique et soucieuse de bien-être… Qui? La génération Z, dont le rapport au travail serait très différent des précédentes. Comment gérer la relation professionnelle avec les moins de 30 ans? Nous avons posé la question à un entrepreneur.
Dans son principal domaine d’activité, l’informatique, la pénurie de talents est un fait établi. "Mais il faut nuancer", indique Bernard Persoons, CEO de BDE Group – une coupole qui regroupe plusieurs entreprises IT dont Bisoft. "La pénurie se fait surtout ressentir dans les petites structures; les techniciens en informatique recherchent des entreprises un peu plus grandes pour développer leurs compétences et accéder à des formations. Bisoft, qui occupe une trentaine de personnes, bénéficie d’une meilleure attractivité."
En 25 ans de carrière, ce polyentrepreneur (qui est aussi administrateur de l’EPHEC et du groupe BAO) a vu évoluer les profils. Même s’il faut relativiser, il semble évident que les aptitudes et comportements des "Z" (nés après 1995) diffèrent de ceux de leurs devanciers.
"C’est une génération qui a soif de nouveauté, qui est agile. Ils se distinguent par leur capacité à apporter des idées et ne craignent pas de les exprimer."
Ce que souligne aussi Bernard Persoons, c’est un rapport plus utilitariste des vingtenaires à leur travail: "Beaucoup veulent d’abord organiser leur vie. Ce qu’ils viennent chercher dans l’entreprise, ce sont les moyens d’y parvenir: un salaire, des congés, une voiture... Ils n’hésitent pas à partir s’il leur semble que ces moyens seront mieux garantis ailleurs. J’ai dû apprendre à gérer cela, à gérer le fait que des employés n'épousent pas forcément mon projet d'entreprise." Sans même parler des difficultés à organiser les équipes à l’heure du télétravail…
"L’équilibre est difficile à trouver parce qu'on doit gérer à la fois le collectif et l'individuel. À cet égard, la législation ne nous aide pas. Quand un technicien s’interrompt pour aller chercher ses enfants à l’école et reprend son travail le soir, est-ce que ce sont des heures supplémentaires? Et s’il a un accident sur le chemin, avec sa voiture de société, est-ce un accident du travail? Ce sont des problématiques quotidiennes avec lesquelles nous devons jongler. Or la réglementation n’a pas évolué, elle n’a aucune souplesse."
L’enjeu, pour Bernard Persoons, c’est de redéfinir des règles acceptables par tous. Et de réinventer le rôle des managers: "Les cadres actuels, qui étaient juniors au début de ma carrière, n'ont jamais vraiment appris à gérer des équipes – surtout pas dans un contexte de bouleversements psychosociaux comme nous les connaissons. La génération Z les met au défi, d’une part parce qu’elle est capable de challenger leurs compétences, d’autre part parce qu’elle n'accepte plus les rapports d’autorité. Les managers ne sont plus des ‘chefs’; ils doivent davantage devenir des animateurs."
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