"New Ways of Working": l’expression aurait déjà 30 ans au moins! Et cependant, aux yeux de Lina Benmehrez, cofondatrice du bureau de consultance Roadco, spécialisé en stratégies de collaboration, nombre d’entreprises en restent aux "Old Ways of Working". Et si on abordait le changement sous un nouvel angle?
À l’origine du projet Roadco, lancé en 2022 par Lina et ses associés, il y a ce constat: malgré tous les concepts ronflants promus depuis 30 ou 40 ans – NWOW, entreprise libérée, lean management… – l’organisation du travail et les modes de collaboration peinent à changer: le modèle reste largement celui du "command and control" né de la révolution industrielle, mais qui, dit-elle, "n’est plus du tout pertinent par rapport aux produits et services d’aujourd’hui, ni par rapport aux générations montantes qui arrivent dans les entreprises".
"La pandémie de covid, à cet égard, a été à la fois un révélateur et une occasion manquée. Tout à coup, parce qu’on ne pouvait plus se rencontrer, il a fallu s’adapter à de nouveaux modes de travail. Mais au lieu d’en profiter pour repenser la collaboration, beaucoup d’entreprises sont retournées dès que possible vers leur modèle traditionnel, centralisé, hiérarchisé."
Pas facile de tout changer: les modes de collaboration sont bien ancrés dans les structures et les mentalités, ce qui peut expliquer certains échecs ou atermoiements dans les entreprises qui tentent la transformation.
"Souvent, on garde les structures traditionnelles, mais on tente d’implémenter de nouvelles méthodes par-dessus, ce qui bien sûr ne fonctionne pas. C'est tout le système qu'il faudrait repenser; c’est difficile, mais de plus en plus d’entreprises y parviennent."
Lina Benmehrez propose d’aborder le problème sous un autre angle. "Au lieu de parler de ‘change management’ et de concepts ambitieux, ce que nous proposons, c’est de partir des tensions quotidiennes dans les équipes: ‘pourquoi dois-je venir au bureau si c’est pour enchaîner des visioconférences?’, ‘pourquoi dois-je utiliser trois outils différents avec mes collègues, mon prestataire et mon client?’, etc. À partir de là, nous avons mis au point une matrice d’analyse, qui aide le manager à catégoriser les tensions et les résoudre. Ensuite seulement, on ira progressivement vers la vision stratégique. C’est beaucoup plus concret."
Les clés d’une collaboration à la fois performante et satisfaisante pour les équipes, selon Lina? "La transparence, pour que chacun sache ce qui se passe; la liberté décisionnelle des collaborateurs dans leurs tâches; le leadership, qui suppose de donner aux managers les outils dont ils ont besoin; et aussi ce que j’appelle la variabilité ou l’évolutivité. Il faut donner des perspectives d'évolution aux collaborateurs dans leurs rôles, tout comme il faut permettre aux entreprises de faire évoluer leur raison d'être. Mais il faut aussi reconnaître que les individus changent, comme l’entreprise change, comme le monde change..."
Pour aller plus loin
Lina Benmehrez animera le 18 avril prochain un atelier sur les nouvelles formes de collaboration, dans le cadre du cycle "Philo & Business" proposé par l’EPHEC.
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