Subir ou conduire le changement?

2/10/2023
Idées
Thomas Edison et son phonographe (domaine public).

‍Souvent nécessaire, toujours inévitable mais parfois mal-aimé: le changement est un moteur de la vie humaine comme de celle des entreprises. Comment "gérer le changement"? Luc de Brabandere, philosophe d’entreprise, évoquera le sujet lors de la rentrée académique de l’EPHEC, ce 10 octobre.

General Electric détient un record: pendant plus d’un siècle (de 1907 à 2018), l’entreprise fondée par Edison a fait partie, sans interruption, de l’indice Dow Jones. Mais dans ce laps de temps, ses activités se sont plusieurs fois renouvelées: au départ de l’énergie et des équipements électriques, elle a successivement investi (ou désinvesti) dans la radio-télévision, les plastiques, les ordinateurs, l’aéronautique, les technologies médicales… Bref, sous le même nom, GE n’a cessé de changer. Et même si, aujourd’hui, le groupe "n’est plus ce qu’il était", il reste un acteur majeur dans plusieurs domaines.

Voilà qui permet d’illustrer différents aspects du changement, à commencer par son caractère souvent souhaitable, voire nécessaire – sans changement, pas d’innovation ni de progrès –, mais surtout inévitable:

"Comme on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, on ne se baigne jamais deux fois dans le même business", observe Luc de Brabandere.

Ainsi les algorithmes, auxquels il vient de consacrer un livre ("Petite Philosophie des algorithmes sournois", éd. Eyrolles), sont en train de modifier profondément nos sociétés à travers les réseaux sociaux, l’intelligence artificielle, etc. Même si nous n’en avons pas envie (ne parle-t-on pas de "résistance au changement"?), le changement se produit.

Pour Luc de Brabandere, la question n’est donc pas de savoir s’il faut changer ou non. "Elle est de savoir si on veut conduire le changement ou le subir."

"Il y a deux types de changement", ajoute-t-il. "On peut changer les choses et changer la perception qu’on a des choses. La ‘révolution’ copernicienne n’a eu aucun impact sur le système solaire, mais Copernic nous a appris à le regarder autrement. Le changement de la perception est nécessairement une rupture. Le changement de la réalité, en revanche, est parfois très lent, voire invisible à l’œil nu : on ne voit pas que les cheveux poussent, mais on voit qu’ils ont poussé."

"En outre, pour changer vraiment il faut changer deux fois : quelqu’un qui est toujours en retard ne deviendra ponctuel que s’il change à la fois son organisation et ce qu’il pense de l’exactitude. Diminuer le nombre de ses réunions ne suffira pas, si cela ne s’accompagne pas, par exemple, du plaisir d’être à l’heure. Autre exemple : la fusion des entreprises A et B ne sera une réussite que si elle entraîne un changement de la réalité – un seul bilan comptable, une seule informatique, etc. – et qu’en même temps, l’ensemble des personnes concernées partagent une même vision stratégique. L’entreprise C n’existera pas tant qu’on parlera d’ex-A ou d’ex-B ! Seul un changement de perception rend le changement de réalité irréversible."

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