Et si le temps n'était pas ce qu'on croit?

11/10/2022
Idées
(Photo: Willian Justen de Vasconcellos/Unsplash)

La physique peut-elle nous aider à modifier notre perception du temps? Et cette approche peut-elle aider les entreprises? C'est ce que pense Christian Kelma, ingénieur-entrepreneur devenu auteur et conférencier, à l'initiative de la fondation Planet Sapiens.

Depuis de nombreuses années, Christian Kelma s'intéresse à la perception du temps. "Dans le monde de l'entreprise", explique-t-il, "la compréhension du temps a évolué pendant la révolution industrielle. Depuis lors, tous les efforts ont été orientés vers la productivité, qui n'est rien d'autre qu'une quantité divisée par unité de temps. Le but était donc de compresser le temps au maximum, ce qui a conduit à de nombreux problèmes que l'on connaît aujourd'hui, depuis le désengagement des collaborateurs jusqu'aux crises environnementales ou sanitaires, qui ont aussi un rapport avec la recherche de productivité."

Ce "blocage", comme le désigne Christian Kelma, serait lié à notre vision linéaire du temps: un flux à sens unique, qui s'écoule de manière uniforme, "comme la trajectoire d'un bateau qui avance vers l'horizon, dans le futur, en laissant derrière lui un sillage, qui est le passé. Si on prolonge cette trajectoire, on conçoit un futur qui est à l'image du passé – mais qui est limité. En entreprise, c'est le 'business as usual'."

"En physique, la conception du temps est très différente", reprend l'ingénieur. "Tout est constitué d'événements, qui ne se produisent jamais simultanément: il y a toujours un délai, même minime, entre eux. En conséquence, le temps n'existe que parce que tout ne peut pas se produire en même temps, et nos actes sont toujours des interactions avec ces événements. Cela nous donne une autre définition du temps : c'est un indicateur de notre capacité à interagir avec les événements. Si vous n'interagissez pas, il n'y a pas de temps. Dans cette perception, le présent est le seul lieu où le temps existe: il n'existe pas dans le futur, qui n'est pas encore survenu, tandis que le passé ne contient plus de temps. L'enjeu est de savoir comment on interagit dans le présent."

Il revient à la métaphore maritime:

"On peut voir les choses différemment: si ce n'était pas le bateau qui avance, mais l'eau qui venait vers lui? Dans ce cas, l'horizon s'ouvre complètement; le présent est fixe, le futur est illimité et il n'est plus à l'image du passé: vous faites venir à vous ce que vous voulez."

Un changement de point de vue qui pourrait être salutaire face aux défis sociétaux: "Sur ces questions, on a tendance à définir le futur par opposition à ce qu'on ne veut pas: tout le monde est contre le changement climatique. Mais quel est le monde dans lequel nous voulons vivre en 2030? Qui l'exprime aujourd'hui? Finalement, c'est cela qui est en jeu dans notre perception du temps: que voulons-nous faire du futur? C'est particulièrement vrai dans le monde de l'entreprise."

Ou, comme le disait le philosophe Henri Bergson : "L'avenir n'est pas ce qui va arriver, mais ce que nous allons faire"...

Pour aller plus loin: Christian Kelma donnera une conférence en ligne pour l'EPHEC, le 7 novembre 2022. C'est gratuit! Info et inscriptions: "Les pionniers des temps nouveaux".

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