À écouter certains, y compris parmi les entrepreneurs, la Belgique serait un pays déficient, à la gouvernance défaillante, normatif à l’excès, aux structures hypertrophiées et inefficaces, sans vision ni projet. Un pays à fuir pour des horizons plus lumineux. Est-ce une pensée bien raisonnable?
Et si vous pouviez choisir sans contrainte le pays où vous aimeriez vivre et travailler? Où iriez-vous? "Ailleurs!", répondent certains de nos compatriotes. "Là où l’État est efficace." "Où l’initiative est encouragée." "Où l’on investit dans l’avenir." On l’entend parfois, cette petite musique, dans la bouche d’entrepreneurs qui ne manquent pas d’exemples à donner, en Europe et surtout au-delà.
Sans tout-à-fait leur donner tort, il faut tout de même nuancer. Au jeu des comparaisons, force est de constater que nous vivons dans l’un des pays les plus favorisés du monde.
Des exemples?
Prenons l’Indice de Développement Humain (IDH), publié par les Nations Unies. Imaginé pour dépasser les limites d’indices économiques comme le PIB, l’IDH se fonde sur la santé, l’éducation et le niveau de vie pour évaluer le bien-être des populations. C’est la Suisse qui présente l’IDH le plus élevé (0,967). La Belgique (0,942) figure au 12e rang mondial, devant des pays comme les États-Unis (20e) ou la France (29e).
La Belgique compte aussi parmi les démocraties les plus avancées: avec un score de 96/100, elle se situe en 11e place du classement établi par la Freedom House – une ONG américaine qui promeut les libertés civiles et politiques. La Finlande, en tête, est le seul pays noté 100. Les USA n’arrivent qu’en 58e place, avec un score de 83…
Autre indicateur: le coefficient de Gini, qui mesure les inégalités de revenus. Plus il est élevé, plus elles sont grandes. Avec un indice de 24,9, la Belgique figure dans le top 10 des pays les plus égalitaires, devant tous ses voisins: les Pays-Bas obtiennent 26,3 et la France 29,8. Pour trouver les États-Unis (39,7), il faut descendre au-delà de la 100e place.
Tous ces chiffres font-ils le bonheur? La notion est plus subjective; néanmoins, elle aussi fait l’objet d’un classement, établi par l’institut Gallup. Les Finlandais, encore eux, seraient les plus heureux, avec un indice de 7,741. Les Belges (6,894) apparaissent au 16e rang, une fois encore devant les Américains (23e), les Allemands (24e) ou les Français (27e).
Que retenir? Qu’à bien des égards, il vaut mieux naître en Belgique que dans la plupart des pays du monde (sauf peut-être les pays scandinaves, souvent aux premiers rangs).
Certes, ce bonheur est fragile. Nous devons être conscients que notre niveau de vie, notre bien-être ou nos libertés ne sont pas acquis, mais dépendent de conditions favorables qu’il faut entretenir. Les mécontents ont donc raison de dénoncer les dérives de gouvernance, les insuffisances des services publics ou les risques économiques. Mais il ne faudrait pas en oublier quelle chance nous avons de vivre ici.
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