Tour à tour dessinateur de BD ("Germain et nous", "Froud et Stouf"…), musicien dans un groupe pop (les Bowling Balls, Zinno), humoriste en télé et en radio (les Snuls, JAADTOLY…) – et même auteur d’une capsule pour l’EPHEC: Fred Jannin explore depuis (plus de) 40 ans les voies de la créativité. Mais où va-t-il chercher tout ça?
Entreprendre, c’est (entre autres choses) imaginer: ce que pourrait être une nouvelle solution, un nouveau produit pour un nouveau marché. C’est résoudre un problème en l’abordant sous un nouvel angle. C’est trouver une idée qui, elle-même, va trouver son public – ou pas.
Mais comment naissent les idées? Et y a-t-il un secret pour les stimuler? Nous avons posé la question à Frédéric Jannin, qui éprouve le potentiel de sa propre imagination depuis plus de 40 ans. Où trouve-t-il tout ça?
"Si je le savais!", s’exclame-t-il. "Je n’ai pas de ‘truc’, mais je me souviens très bien de conversations avec Peyo – à mon âge, je peux me permettre de pontifier un peu... Peyo disait que c’était une question de tournure d’esprit; un petit moteur qu’on lance et qui agit comme un filtre sur la réalité. Une fois que ce moteur tourne, vous voyez la réalité autrement et les situations vous apparaissent d’elles-mêmes. Ça m’a frappé, parce que je me suis rendu compte que c’est effectivement ce que je fais. Et la réalité est une ressource inépuisable: je ne suis jamais tombé en panne!"
Le filtre de Fred Jannin, c’est bien sûr celui de l’humour, par une "torsion" de la réalité, par un petit décalage (gentiment) moqueur. On l’apprécie par exemple dans la capsule réalisée avec son complice Stefan Liberski pour les 50 ans de l’EPHEC, en 2019. On y retrouve les "BrainZaps". Deux personnages speedés empruntés à JAADTOLY, dont on apprend qu’ils ont "fait l’EPHEC" ("Tous les principes du business! Ceux de la vie, la vie du winner! Un exemple: le hamburger d’insectes, c’est moi!").
L’autre clé de Fred Jannin, c’est l’envie:
"Le danger, c’est d’oublier ça. Oublier que des gens peuvent faire quelque chose simplement par envie. Si on l’oublie, on pourra rayer le mot ‘inspiration’ des dictionnaires."
L’envie suppose la liberté: celle qu’on se donne – parce que nous sommes souvent nos premiers censeurs – et la liberté qu’on prend. "René Goscinny disait, quand il était rédac’chef de Pilote, ‘Il ne faut pas demander aux gens de quoi ils ont envie. Il faut leur apporter quelque chose dont ils ne pourront plus se passer’. Et pour cela, il faut leur servir plein de choses différentes, pas un produit formaté. De toute façon, personne ne connaît la recette – et s’il y avait une recette, ce ne serait plus amusant."
"Il faut laisser faire le hasard et l'envie. Il faut garder un côté puéril. Je vais encore radoter, mais quand Peyo et Franquin déjeunent, que Peyo dit ‘passe-moi le schtroumpf’ et qu’ils se mettent tous les deux à parler schtroumpf, c'est parce que ça les amuse. Pas en se demandant ‘Qu'est-ce qu’on va trouver pour vendre des albums ?’"
Info: Jannin et nous
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