Quitter un emploi pour retourner dans les auditoires, reprendre des études alors qu’on est déjà dans la vie active, c’est comme prendre un pari avec soi-même. C’est aussi comprendre de quoi on est vraiment capable et se convaincre que l’on peut réussir.
En 2020, alors que je travaillais depuis quatre ans, j’ai quitté mon emploi d’esthéticienne – en CDI, à temps plein – pour entamer des études de droit à l’EPHEC. Je sais, moi aussi ça me paraît encore un peu dingue… Cela n’a pas été sans mal, mais je ne l’ai jamais regretté et aujourd’hui, je referais le même choix.
Au sortir de l’école secondaire, j’avais d’abord entamé puis abandonné des études de kinésithérapie, avant de m’orienter vers des formations d’esthétique, de massothérapie et de maquillage, complétées d’un diplôme en gestion d’entreprise. Très vite, j’avais obtenu du travail. Mais quelque chose n’allait pas. Même si j’y trouvais des satisfactions, j’ai compris que ce métier ne me conviendrait pas à long terme: les horaires sont difficilement compatibles avec une vie familiale, la tâche est physiquement dure et je n’y trouvais pas assez de sens.
J’ai choisi de ne pas me rendre malheureuse. J’ai passé un test d’orientation très poussé, pour un résultat sans appel: j’étais faite pour le droit! Un verdict qui m’a fait un peu peur. Il allait falloir reprendre des études. Étais-je seulement capable de décrocher un bac, après avoir échoué en kiné? Et avec quels moyens, moi qui allais perdre mon salaire?
Outre les inquiétudes financières que cela engendrait – je savais que j’allais devoir surveiller mon budget de très près pendant trois ans, sans droit à l’erreur –, j’allais aussi devoir franchir un gros obstacle psychologique: reprendre des études, alors qu’on travaille déjà, qu’on a quitté la maison familiale et qu’on vit en couple, c’est un peu comme si la vie reculait au lieu d’avancer – une autre bonne raison de ne pas traîner!
À la rentrée académique, j’ai pris un coup de vieux: la plupart des étudiants avaient six ou sept ans de moins que moi et je ne me reconnaissais pas toujours dans le style vestimentaire, les expressions, ni la vision des choses en général. J’ai vite mesuré la différence de génération et parfois un contraste important entre moi et mes camarades envers mes contraintes "d’adulte", pas toujours facile à harmoniser.
Mais tout de suite, j’ai su que j’étais au bon endroit. J’éprouvais beaucoup moins de difficultés à étudier, alors qu’à 20 ans, c’était un fardeau. Tout a pris sens.
C’est qu’à 25 ans, on n’est pas la même personne qu’à 20. Au sortir des secondaires, comme beaucoup d’élèves, je manquais sans doute de maturité. Aujourd’hui, je mesure la chance de pouvoir reprendre des études et je me dis que j’ai les moyens de réussir. Quand on le comprend, ce qu'on fait prend une autre dimension. On trouve la motivation, la vraie, celle qui permet de se dépasser. Pas sans effort, mais tout de même plus facilement.
Elise Keustermans
3e bac en droit
En lien avec cet article:
Avez-vous trouvé votre ikigaï?