Edito: Faut-il couper le moteur thermique?

5/12/2022
Idées
(Photo Standret/Freepik)

L’Union européenne a décidé de mettre fin à la vente de voitures thermiques en 2035. Dans 12 ans: autant dire demain. Mais les alternatives sont-elles prêtes? Et sont-elles vraiment plus écologiques?

Nous voulons tous préserver la planète et réduire le risque climatique, ce qui implique des changements radicaux dans nos modes de vie. Cela ne signifie pas que toute décision politique soit bonne à prendre s’il s’agit de réduire les émissions de CO2.

En tant qu’étudiant en électromécanique, je me suis intéressé au débat autour de l’abandon des véhicules thermiques – qui seront interdits à la vente en Europe dès 2035. Alors qu’aujourd’hui, les voitures hybrides et électriques ne représentent que 7,5% du parc belge, on peut se demander si l’objectif est réaliste – et même s’il présente un véritable gain écologique.

On connaît les avantages de la voiture électrique: pas de combustion, donc pas de pollution locale. On connaît également ses inconvénients: un coût plus élevé, une moindre autonomie, de longues recharges… Mais aussi une empreinte écologique qui, sur l’ensemble du cycle de vie, n’est pas forcément favorable. Il faut fabriquer les batteries, ce qui pollue. Et si le moteur électrique ne pollue pas, il faut tout de même produire l’électricité. À moins de sources d’énergie totalement décarbonées, il y a donc bien des émissions de CO2. Autre problème : les batteries utilisent des métaux, dont les quantités disponibles ne suffiront pas à tous les besoins. Il n’y aura probablement pas de voitures électriques pour tout le monde.

Certains experts considèrent que l’avenir, c’est plutôt la voiture à hydrogène. Là non plus, pas de pollution locale – et une autonomie supérieure à l’électrique. Mais l’hydrogène n’existe pas à l’état natif, pas plus que l’électricité. Il faut le produire, ce qui réclame… de l’électricité. Autres désavantages: l’hydrogène est inflammable, il s’échappe facilement et son rendement énergétique est faible. La solution ne paraît pas non plus idéale – et ne sera pas meilleur marché.

Bien sûr, ces technologies peuvent progresser. Mais avec le moteur thermique, nous disposons déjà d’une technologie mature, relativement bon marché, dont les performances environnementales n’ont cessé de s’améliorer et restent perfectibles. D’une part, il est techniquement possible de remplacer les carburants fossiles par des agrocarburants de 2e génération ou des carburants synthétiques "neutres en CO2" (qui ont aussi leurs inconvénients et ne sont pas encore disponibles à grande échelle). D’autre part, des gains importants peuvent être obtenus en limitant la vitesse et le poids des véhicules.

L’Europe fait-elle le bon choix en forçant son industrie automobile à couper le moteur thermique, au risque de laisser son développement à d’autres?

L’enjeu n’est pas seulement écologique, ni économique. Il est aussi géopolitique: de qui dépendrons-nous pour faire rouler nos véhicules? Et social: qui aura le privilège de se déplacer?

Othmane Mouhim,

2e bac électromécanique

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